MA LETTRE OUVERTE A SARKOZY OU
COMMENT CONVERTIR SARKOZY ET
LES
RACISTES DE LA FRANCE ENTIERE A LA
FRANCE POSITIVE
suivi de la condition africaine
Hommage à Françoise MAFFRE- CASTELlANI
et à tous les citoyens du Monde
INTRODUCTION
Monsieur le Président de la République française.
Je viens par la présente apporter ma modeste contribution au débat sur l’identité nationale française. Débat que vous avez eu le courage de lancer par l’entremise du ministre de l’intégration, Monsieur Eric Besson. Par ailleurs, j'ai appris que votre goût pour ce débat est tel que vous serez très heureux en le relançant sous un autre angle. Pour la petite histoire, ce débat est l’aboutissement d’un long processus qui a commencé avec la création d’un Ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Co-développement1 avec Brice Hortefeux,2 puis Eric Besson. Le deuxième moment est le lancement du grand débat sur l’identité nationale par Eric Besson sur le site du ministère de l’immigration dédié au débat3.
Comment définir l’identité nationale française dans le contexte de l’européanisation de la France et de la mondialisation ? Qui est Français dans un monde où aucune frontière ne résiste devant la circulation des idées, des pensées, des cultures et des valeurs quelles qu’elles soient ? On a résumé l’ensemble de la question à ceci : qu’est ce qu’être Français au XXIe siècle ?
Vous comprenez, Monsieur le Président, en immigré que je suis, dans quelle situation je me trouve au moment où je vous écris. Certaines questions, beaucoup de questions même, traversent mon esprit. Ma première contribution a t'elle été lue par ceux-là mêmes qui ont initié ce débat ? J’avais noyé ma réflexion dans la multitude d’autres sur le site du ministère, mais, quelle a été sa place ? Qui a osé s’arrêter cinq minutes, trois minutes ou deux minutes pour lire, simplement lire ce qui m'avait pris beaucoup d'énergie à écrire ?
Aujourd'hui, alors qu'une certaine opinion attend le lancement officiel de la deuxième phase de ce débat, je suis encore envahi des questions. Est-il utile et / ou important d’intervenir afin de donner son avis sur un sujet qui fait peur et choque certaines sensibilités ? D’ailleurs pourquoi la question choque-t-elle ? Il est évident qu’il n’est pas habituel de se poser des questions de ce genre au quotidien. Toutefois, se poser la question de son identité serait-ce un recul pour la République initiatrice des Droits de l’homme et du citoyen, comme le pensent certains ?
Monsieur le Président, pour apporter une nouvelle fois ma contribution, j'ai pris une partie du temps de mes vacances pour vous rélater ce que mon esprit confus me dit d'écrire. J'espère, par ailleur que, vous aurez encore envie de lire lorsque ces pages s'afficheront devant vous.
Je sais, par expérience, que les pays qui avancent ou aimeraient avancer se posent des questions et n’hésitent pas à se remettre en cause pour fixer les nouvelles bases et définir de nouvelles perspectives. L’Histoire nous fournit de nombreux exemples ; la Révolution française de 1789, par nature, est une remise en cause de l’absolutisme. Toute Révolution est une remise en question de la société telle qu’elle est, pour une société telle qu’elle devrait être. L’évolution est donc la somme d’un ensemble de réponses sur des questions généralement enfouies ou taboues que les hommes armés d’un courage certain ont soulevées à un moment ou un autre de leur vie.
PREMIERE PARTIE
IDENTITE NATIONALE, UN DEBAT NECESSAIRE
« Il est plus important de considérer l’avenir que le présent, et il est des maux comme des ennemis d’un Etat au-devant desquels il vaut mieux s’avancer, que de se réserver à les chasser après leur arrivée. »
Cardinal de Richelieu4
I-1 : POURQUOI BOYCOTTE- T- ON CE DEBAT ?
Monsieur le Président, vous voudriez sans doute un débat serein et sans passion au départ. Mais à l’arrivée, il fait couler tant d’encre et tant de salive que certains (minoritaires ou majoritaires peu importe) s’interrogent sur l’utilité d’un tel débat en France. Pourtant est-il choquant de déterminer la nature des liens qui attachent ou rattachent un individu à la République ? Ces liens sont-ils superficiels, ou solides et en quoi sont-ils déterminants dans la relation avec l’autre ? Ces deux questions devaient nous aider à nous interroger de façon réfléchie sur le regard que nous portons sur la France, considérée comme l’expression de tous les espaces, car la République n’est pas un conglomérat de « moi » isolés, mais une réelle communauté qui a une histoire, qui cimente le sentiment du vivre ensemble et qui aspire à bâtir un même avenir.
Nous pouvons bien sûr construire un même avenir malgré le fait que le passé ne nous rapproche pas vraiment. Pour être plus clair, dans le cas de la France, le passé5 des uns et des autres ne sert pas la cause de la Nation, car il est trop différent. Mais, toute différence n’est pas négation. Est-il possible d’avoir un même futur quand on n’a pas eu le même passé ? Je réponds à cette question par l’affirmative, quoi qu’il y ait des conditions à cela. Le cas le plus connu et le plus frappant est celui des Etats-Unis. En effet, l’actualité de ces dernières années nous permet de constater que les fils des anciens propriétaires d’esclaves6 et les fils des anciens esclaves7 sont ensemble assis autour d’une même table pour servir une même cause : la Nation américaine. Bien évidemment, il y a encore des montagnes à gravir, des victoires à remporter sur des esprits non encore assez évolués. Pour y arriver, il faut une farouche volonté des uns et des autres.
Pour ce qui concerne les Français, à mon avis, la volonté de s’interroger et l’envie de débattre, pouvait être comprise comme signe d’ouverture. Dans ce cas, j’appelle les uns, les Français par le droit du sang, et les autres, les Français par naturalisation. Le problème une fois posé, les questions deviennent simples et s’enchaînent : comment les uns et les autres vont-ils se situer si personne ne connaît sa place dans la République ? La France a-t-elle une identité ? Si oui, est-elle en perdition ?
Répondre à ces questions, est-ce lamentable au point d’exiger l’arrêt du débat dans un pays qui prône la liberté de pensée ? Ces questions pourraient nous ouvrir une porte vers d’autres, plus philosophiques, (Qui suis-je ? Qui est l’autre ?). Si ces questions sont philosophiques, il n’est pas nécessaire d’être philosophe pour y répondre car à mon avis, elles sont pleines de sens, ont tout leur intérêt et rendent le débat relativement aisé.
En outre, un débat d’une telle ampleur ne devrait être que public. Il n’y a aucune raison de l’enfermer dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale ou dans des Préfectures. Le mal vient de ce qu’il y a encore des gens - ceux-là qu’on nomme les « voix autorisées » - qui continuent de penser qu’ils ont la certitude d’avoir raison sur tout. Ils se méfient du peuple au prétexte que le peuple est émotif. Ils sont mal à l’aise à l’idée d’un débat public. Or devenu public, ce débat serait une vraie occasion pour le peuple de s’exprimer, quelle que soit la douleur. C’est à ces gens-là que répond en quelque sorte René Descartes dans son Discours de la méthode : « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée; car chacun pense en être si bien pourvu que ceux même qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre chose n'ont point coutume d'en désirer plus qu'ils en ont. En quoi il n'est pas vraisemblable que tous se trompent: mais plutôt cela témoigne que la puissance de bien juger et distinguer le vrai d'avec le faux, qui est proprement ce qu'on nomme le bon sens ou la raison, est naturellement égale en tous les hommes; et ainsi que la diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les uns sont plus raisonnables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies, et ne considérons pas les mêmes choses. Car ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est de l'appliquer bien. Les plus grandes âmes sont capables des plus grands vices aussi bien que des plus grandes vertus; et ceux qui ne marchent que fort lentement peuvent avancer beaucoup davantage, s'ils suivent toujours le droit chemin, que ne font ceux qui courent et qui s'en éloignent. »
Sur des sujets comme l’identité nationale, chacun devrait avoir une opinion et pouvoir l’exprimer puisqu’il ne s’agit pas de fuir le débat, mais d’écouter l’autre dans sa différence même si cela demande évidemment beaucoup de tolérance. Mais n’est-ce pas cela la base de la démocratie qui elle admet le débat contradictoire. Sur un sujet comme celui-ci, dont le fondement est de s’interroger sur son identité afin de mieux se définir soi-même, la contradiction ne peut qu’être admise. Et la célèbre injonction de Socrate, « Connais-toi, toi-même »8, nous y invite.
Qui a peur de faire un travail introspectif, dans le sens de se regarder dans un miroir ? Cette question soulève un autre sujet sur l’affirmation de son existence. Comment peut-on exister sans se définir, car l’affirmation de soi précède l’existence de soi. Qui a peur de débattre avec soi-même ? Qui veut étouffer ce débat ? Quels sont leurs réels mobiles ?
En y réfléchissant, j’en suis arrivé à la conclusion que le refus de se donner l’exigence de se poser cette question, au moins une fois dans sa vie, peut témoigner d’un malaise dont les causes sont plus inavouées qu’avouées. Dans certains cas, il y a la peur de se découvrir soi-même tel quel, peur relative à la connaissance de ses origines aussi lointaines soient-elles. La réponse à cette question serait pourtant déterminante pour répondre à une autre, certainement choquante : A quand remonte notre attachement ou rattachement à la France ? Il s’agit alors, de se situer dans le temps, et l’Histoire pouvait y aider. Et neuf fois sur dix l’individu se serait rendu compte qu’il n’a jamais été ‘’Français de souche 9‘’. C’est en cela que cette question est intéressante, car elle ferait tomber ce que l’individu a toujours considéré comme évident. De la même façon, les ‘’jeunes Gaulois’’10 auraient été heureux de découvrir que Vercingétorix11 n’était pas Français12. Dans ces conditions, on bâtit son identité sur des certitudes sans fondement véridique et historique, donc sur l’ignorance. Et Platon l’a déjà montré : ceux qui ont la certitude d’avoir raison sont plus dangereux que les ignorants, car un ignorant, du moment qu’il sait qu’il ne sait rien, apprend ; ce qui n’est pas le cas de ceux qui pensent qu’ils savent tout. Ils prennent leurs théories pour des certitudes. Ils refusent tout ce qui ne correspond pas à leurs schémas. C’est parmi eux aussi qu’on trouve le plus grand nombre de xénophobes, d’où il ressort que le refus du débat répond au besoin de se protéger contre soi-même par le biais des certitudes infondées.
Dans d’autres cas, il y a la peur de se dévoiler. L’individu connaît ses origines mais refuse de dire simplement : - je suis Français et mes origines sont…. Ici, l’individu a tout bonnement peur de voir contester son identité, qu’il voudrait française d’origine gauloise. Cette dissimulation est rendue facile si la connotation de la peau a des similitudes avec celle de Vercingétorix ! Il y a, alors, volonté manifeste de ne pas débattre pour se protéger de l’autre.
Les uns comme les autres peuvent avoir des attitudes similaires qui se traduisent par la contestation identitaire de ceux qui ne correspondraient pas à leurs critères. Le critère le plus visible étant la couleur de la peau. Elle devient un élément de différenciation, d’acceptation, et/ou de refus de l’autre. Ce qui nous renvoie au refus de la différence. Ce refus peut être fondé sur la peur de l’autre, l’inconnu, l’envahisseur.
A mon avis, ces deux raisons inavouées peuvent être des éléments explicatifs qui pourraient nous aider à comprendre les débordements relevés ici et là dans le cadre de ce débat. Par ailleurs, ces raisons inavouées pourraient aussi expliquer l’attitude consciente ou inconsciente de certains qui militent pour boycotter le débat.
I-2 : DU DEBAT AUX DEBORDEMENTS
Le moyen le plus efficace pour que le débat n’ait pas lieu, c’est de le noyer dans une vague de débordements qui le conduisent à de dangereuses dérives. Le piège ainsi ouvert devient un alibi pour déclarer ce débat nul et non avenu. Malgré tout, les partisans de la majorité présidentielle, sans trop de convictions ni d’arguments s’acharnent à défendre le bien-fondé du débat. Certains, à la solde de Nicolas Sarkozy, sont obligés, malgré eux, de le défendre parce que ce débat émane de la volonté du Président. Ils sont condamnés à ne pas réfléchir par eux-mêmes. C’est à juste titre qu’on les nomme les « valets de la cour du roi.» 13 Ils ont conscience que leur existence politique dépend de la fidélité aux idées du chef. Quelles que soient ces idées. Au fond, ils voudraient que ce débat prenne fin. Si le Président de la République agissait dans ce sens, ce serait presqu’un soulagement pour certains d’entre eux. Dans l’immédiat, seul Eric Besson a saisi l’occasion de se démarquer. Il sait que ce débat le rend important, même très important dans certains milieux.14
D’autres par contre, partisans de l’opposition,15 répètent à l’envi que ce débat est un échec et réclament, son arrêt. On peut signaler que Ségolène Royal était la première des socialistes qui jugeait ce débat utile et important. A vrai dire, à gauche, nombreux sont gênés. Ils voudraient tout simplement que la question soit taboue. En examinant de plus près, bon nombre parmi ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas débattre, évoquent comme principaux arguments la forme du débat et des débordements enregistrés.
La « forme », parlons-en. Les détracteurs de ce débat reprochent sa connotation électoraliste16 pour satisfaire un certain électorat ou mieux un électorat certain. Par ailleurs, en confiant l’initiative du débat au Ministre de l’intérieur et de l’immigration,17 le doute s’installait sur sa neutralité : les esprits qui ne sont pas mûrs seraient tentés de penser que, si l’identité nationale est menacée, c’est à cause de l’immigration.
La deuxième raison serait que les Français mêlent immigration, Islam, burqa, voile intégral, banlieues chaudes et autres choses de ce genre. Par conséquent, il y a lieu de couper court au débat. C’est en ce sens qu’il faut comprendre l’appel en ligne sous le titre : « Nous exigeons la suppression du Ministère de l’Identité Nationale de l’Immigration.»18
Il y a pourtant une chose vraie dans tous ces arguments : ces débordements passionnés proches de la haine de l’autre discréditent le débat. Pour m’en rendre compte, j’ai été l’auteur d’un texte19 sur l’identité nationale que j’ai publié sur un site qui organise des forums20 en ligne afin de mieux m’imprégner des avis sur la question. Et voici quelques commentaires des uns et des autres.
-Participant21 1 écrit : « Ce débat réveille de vieux démons. Avant les élections, on prend les risques bien calculés de stigmatiser encore les immigrés, on oppose implicitement et sournoisement identité nationale et immigration dans l’esprit déjà confus des pauvres Cons-Citoyens que nous sommes, manipulés sans cesse. On attend tranquillement à ce que les Français se soulèvent les uns contre les autres et cette mascarade à laquelle nous assistons n’est qu’une action populiste, un acte de propagande.»
D’autres encore, les xénophobes de tout acabit, les protecteurs de la République, du moins, c’est le titre qu’ils se sont attribués, les partisans d’une République pure, les passionnés, les nouveaux éclairés, les restaurateurs de la « Gaule », trouvent l’occasion tout indiquée de cracher leur haine sur les étrangers et les immigrés. C’est aussi, parmi eux qu’on trouve un grand nombre de ceux qui ont réussi à faire éclater le sujet en l’entrainant sur une voie de confusion totale. En participant à ce débat de façon très passionnée, ils donnent une image impitoyable des Français. Par leurs contributions, le sujet perd toute sa beauté et nous renvoie à des terrains volcaniques. Voici les vérités auxquelles ils croient :
- Participant22 2 :« La France est blanche et de culture gréco-latine, c’est tout. Elle est aussi de religion chrétienne, les athées français sont des « athées chrétiens » au sens où ils ne renient pas la religion de leurs ancêtres même s’ils ne croient plus à ces élucubrations. Que la politique ait décidé arbitrairement de donner les droits civiques aux extracontinentaux d’origine, ne concerne que la politique, et non le peuple qui n’a pas prit part à ses décisions. Vous savez très bien que si un référendum était organisé sur ces questions en ne faisant voter que les Français de souche, c’est-à-dire les Européens de souche de nationalité française, le résultat serait catastrophique pour les très fameuses « chances pour la France » ! Quant à savoir pourquoi les « chances pour la France » ne sont pas des « chances pour l’Afrique », nous ne le saurons jamais. Ceux qui se disent Français parce qu’on leur a donné des papiers confondent le verbe « avoir » et le verbe « être » : c’est comme si vous donniez un diplôme de violon à une personne qui n’en a jamais joué, elle pourra dire « j’ai un diplôme de violon » mais elle ne pourra pas dire « je suis violoniste ».
-Participant 3 répond à Participant 2:
« Historiquement, c’est largement vrai jusqu’à la colonisation débutée au milieu du XIXe siècle, encore que Joséphine de Beauharnais ou Alexandre Dumas démontrent que le métissage, grâce aux Antilles, avait commencé bien avant, sans que cela pose problème. Bien entendu, la colonisation, puis la décolonisation, puis la mondialisation, ont bouleversé tout cela. La France est, "ethniquement", totalement métissée (elle l’était bien sûr avant, mais effectivement entre ethnies majoritairement blanches, si on excepte la venue des Huns et des Sarrasins au Ve et VIIIe siècle).
« De culture gréco-latine », Même historiquement, c’est plus difficile à défendre : d’influence majoritaire gréco-latine sans doute, mais difficile d’être absolu. Après la domination romaine, qui a effectivement durablement influencé la culture française, les invasions et installation des francs, d’origine germanique, ont eu une influence très importante, y compris dans notre droit. Et bien sûr les particularités des différents peuples non soumis à la domination romaine se sont toujours fait sentir (basques, flamands …). Donc, même avant les événements de colonisation/décolonisation/mondialisation, la France avait une "culture" très mélangée, qui est bien sûr devenue totalement métissée, même avant la venue nombreuse d’immigrants d’Asie et d’Afrique (avec des vagues d’Arméniens, de Russes, d’Espagnols, d’Italiens, de Polonais, de Portugais, très importantes au XXe siècle.
"De religion chrétienne"... là aussi, je dirais plutôt d’influence chrétienne majoritaire, tellement la religion a été combattue en France depuis le XVIIe et à la fin du XIXe siècle, puis bien sûr fissurée avec les vagues d’immigration non chrétienne.
En démocratie représentative, le peuple délègue à ses représentants le pouvoir exécutif et législatif. Le fait que 55% des Français, malgré la situation économique, acceptent l’idée d’un vote des étrangers aux élections locales, suggère qu’en réalité, une majorité d’entre eux, même d’origine européenne est à l’aise avec l’idée de la nationalisation d’immigrés non-européens, et seule une minorité de français (votant largement pour les partis "nationalistes", soit peut-être 20%) apparaît comme hostile à cette idée. En réalité, la mixité, aussi bien génétique que culturelle de la France est une chance exceptionnelle, si on se réfère à l’Histoire comme à la science. Elle permet un brassage très enrichissant et productif (le succès des Etats-Unis par exemple en est une belle illustration). Mais en situation de conflit l’immigration a toujours été source de tensions, par un mécanisme classique de protection. Pour en revenir au texte de l’auteur23, celui-ci pointe parfaitement le ridicule de la situation actuelle: alors que la France a bâti sa force et sa richesse sur un mécanisme d’intégration de ses immigrés, elle pratique actuellement une exclusion de ses propres nationaux d’origine étrangère (et pas seulement africaine ; il suffit de constater les tracasseries administratives subies par des Français d’origine européenne).
Enfin, il convient peut-être de rappeler que la notion de patrie française date de la Révolution, et donc se trouve, par conséquent, assez récente. Tout cela pour suggérer que par ces politiques tatillonnes et frustrantes, on passe à côté de bien des richesses : l’intégration ne peut commencer par la vexation. »
-Participant 4 :« Les immigrés pauvres que l’on a fait venir en France on le doit particulièrement aux amis RPR24 puis UMP,25 non pas par bonté d’âme, ni parce que les Français ne voulaient pas de certains métiers mais tout bonnement par calcul financier. Le but était de baisser le coût du travail et de passer outre les législations trop favorables aux salariés français, […] c’est là que nos amis capitalistes ont eu l’idée de génie d’importer le Tiers-Monde en France et de faire passer ça pour de l’humanisme. Après s’en être mis plein les poches, après avoir atomisé le droit du travail, après avoir urbanisé comme des malpropres pour "loger" ces malheureux, tout ceci ayant eu pour conséquences de déstabiliser la société française, c’est bien du foutage de gueule de venir faire porter le chapeau aux étrangers, voire d’aller jusqu’à organiser un débat sur l’identité nationale peu de temps avant les élections. »
-Participant 5: « Dix millions de pauvres cons qui vident vos poubelles, creusent vos tranchées qu’il pleuve, vente ou neige, s’usent dans les boulots ingrats. La France est en train de se réconcilier avec ses vieux démons, c’était bien la peine de mettre en sourdine le discours de Le Pen pendant trente ans pour se lâcher comme des fauves aujourd’hui, certainement que la mafia sioniste qui entoure Sarkozy n’est pas étrangère à la promotion du conflit de civilisations, ces derniers sentant une perte d’influence grandissante et l’usure manifeste de leur propagande. »
-Participant 6 :« Les minorités visibles ont quand même moins de problèmes en France qu’ils n’en auraient dans leurs pays d’origine. Pour ces catégories, l’ascenseur social a fonctionné. »
-Participant 7: « Les Français sollicités n’ont rien à reprocher aux musulmans français ordinaires. Néanmoins le F.N.26 surfe sur une ambiguïté du discours ambiant et sur des confusions entretenues par les idéologues identitaires. Toute entreprise de clarification même brève brise son audience. Le pays n’était pas nationaliste. L’apologie d’une France éternelle, bleu blanc rouge n’était plus guère portée quelque soit d’ailleurs la couche sociale. Du bas de la société française jusqu’au plus riche le coq français gonflé d’orgueil ne faisait plus recette. Les valeurs et les identités étaient investies ailleurs dans le travail, dans le sport, dans les loisirs. On a même théorisé " la crise des identités " et la montée des appartenances multiples. Il faut bien avouer que cela plaise ou non, des déplacements se sont opérés. Cela a commencé à mon sens avec la mise en place de la commission Stasi l’été 2003. Ce n’est qu’après que l’on peut parler de processus de reconstruction identitaire nationale sur une base laïque. Pour parler de cristallisation identitaire il faut un processus relativement durable et soutenu avec un élément fondateur fort. Le débat sur les signes religieux discrets ou ostentatoires a duré plusieurs mois. Internet a beaucoup participé à la diffusion des débats sur la question du voile islamique et de la kippa juive. La loi du 15 mars 2004 a renforcé les positionnements pris par les uns et les autres…Le MRAP27 applique la législation française qui a étendu les motifs de discrimination condamnables et défend en conséquence l’idée que " le racisme n’est pas une opinion " mais un délit. Position qui reconnaît le principe de la libre expression qui comprend aussi le droit du blasphème mais qui a comme exception la sanction des propos racistes. En l’état du droit et des débats, il est désormais entendu que la racisation de l’autre ne se fait pas sur la vieille base biologique. Il suffit de globaliser l’autre, de l’appréhender comme groupe indistinct et de façon négative pour tomber dans le racisme condamnable. C’est ce qu’a fait dernièrement Mme Morano28 en "essentialisant" le jeune musulman type.
La cristallisation identitaire a pris un sens national-républicain avec l’arrivée du voile intégral sur la scène nationale. Tout le reste n’est que longue préparation. En ce sens c’est la décision du Conseil d’Etat du 28 juin 2008 qui a relancé le débat du voile islamique mais avec "trop c’est trop" construisant alors un sentiment d’un " nous " et "eux". Ce "nous" national n’a rien à voir avec l’Etat-nation. Il diffère aussi de la formule des identitaires en référence à une "France de 1500 ans". Cela est apparu patent dans certains débats. Cette cristallisation s’est réalisée fin 2009. En ce sens, elle a été construite puisque c’est en 2009 que s’installe la commission Guérin sur le port de la burqa en France, sorte d’alter égo de la commission Stasi. C’est surtout fin 2009 que fut lancé le "grand débat" sur l’identité nationale d’Eric Besson ; débat couplé avec l’affaire suisse des minarets. Il y a une conjonction d’événements fortuits et d’événements voulus qui ont participé à souder un sentiment national, une identité française puisée plus dans une mixité de laïcité ambiguë et de féminisme sélectif que dans la subculture chrétienne.
Il semble bien qu’il faille raison garder. Tous les musulmans ne sont pas visés par cette cristallisation identitaire. Sous le "nous" national-républicain il semble – ce sera à confirmer – que ce ne soit pas une musulmanophobie indistincte mais bien un refus de l’islam intégriste qui soit rejeté. Tout comme de nombreux français abhorrent le christianisme intégriste. Le "eux" trop différent, est plus qu’une différence qui interpelle comme toute différence mais qui néanmoins est jugée acceptable, intégrable dans la diversité de la société. Ici le "eux" signifie différence radicale et inacceptable mais ce rejet ne vaut pas pour tous les musulmans mais uniquement pour la petite minorité qui fait une "interprétation radicale" de la religion. Mon propos vise donc à souligner qu’il faut bien mesurer "l’avantage de l’inconvénient" de tout ce processus périlleux. Auparavant la critique acerbe portait contre les musulmanes voilées mais pas les autres, plus intégrées, moins portées sur un affichage ostensible de la religion. Désormais, avec l’apparition du débat sur la burqa et le niqab la critique porte sur les musulmans extrémistes. Les musulmans ordinaires sont donc des nationaux comme les autres. C’est évidemment mieux que de vouer à l’enfer tous les musulmans de France.
Si cette hypothèse est prochainement avérée théoriquement et surtout confortée par la pratique alors c’est le prisme du "Choc des civilisations" de Bush-Huntington qui perd ici en crédibilité. Ce qui signifie qu’au plan international la solidarité avec le sud notamment avec sa composante islamique puisse se faire- en refus de la domination des peuples du sud sur plusieurs plans - sans que cela constitue une quelconque approbation des pratiques répressives des musulmans radicaux. Mais il y a une ombre au tableau. Tous les problèmes ici et maintenant ne sont pas résolus. En effet, la création du Ministère de l’immigration et de l’identité nationale avec sa politique honteuse du chiffre mène à une dangereuse xénophobie. C’est un fait avéré, souligné par plusieurs auteurs. D’ou la revendication déterminante pour l’avenir de suppression de ce ministère. »
-Participant 8 :« Alors que l’on partage une même monnaie, un même parlement, que nos frontières ont physiquement disparu, ce même Sarkozy, plus contradictoire que jamais, nous impose de nous demander qui est réellement français, alors qu’il fait partie de ceux qui ont vendu la France à ce projet exclusivement américain, que l’on appelle l’Europe ! La vraie question ne devrait donc pas être, qu’est ce qui fait que l’on est français, mais qu’est ce qui fait que l’on est européen ? Pensez-vous ! Bien entendu, tout ceci n’est que le faux pas supplémentaire d’une élite servant misérablement les intérêts américano-sionistes dans leur lutte anti musulmane, et rien de plus ! »
Tous ces débordements et bien d’autres font qu’en France, le climat devient, d’après les mots d’Olivier Besancenot, porte-parole du NPA,29 sur iTélé30 « … nauséabond, islamophobe … insupportable.» Pour certains, c’est un débat des goûts des plus détestables drogues.
Tous ces motifs justifient-ils la réaction de monsieur Vincent Peillon31 ? En effet, invité par Arlette Chabot32, afin de débattre sur l’identité nationale contre Eric Besson, celui-ci a préféré boycotter l’émission. En voici les raisons évoquées : « … on m'a demandé, en tant que responsable socialiste, de venir cautionner cet exercice d'abaissement national en voulant bien jouer les idiots utiles…» Par ailleurs, il a qualifié ce débat « indigne et inacceptable.» Raisons on ne peut plus confuses. Des raisons obscures. J’avoue avoir été choqué de constater qu’on puisse se permettre de refuser de débattre devant des millions de Français quelle que soit sa sensibilité sur la question. Au fond, je voulais savoir en quoi il se démarque de Ségolène Royal, qui n’est pas contre ce débat. La déception née de la confusion fut totale.
Il s’agit là sans nul doute du comportement de nombreux démocrates. J’ai su alors que ce ne devait pas être facile pour des Grecs, fondateurs de la démocratie ! Peut-être étaient -ils plus évolués que nous dans l’acceptation du débat sur la place publique.33 Mais, pouvaient-ils faire autrement ? C’était le prix à payer. Etre démocrate, suppose une dose infinie d’adaptation, de tolérance et d’ouverture d’esprit. On devrait discuter de tout, quel que soit l’adversaire politique. C’est là l’exigence démocratique qui nous rend forts par la puissance de nos idées. L’inverse n’est pas vrai.
Tout bien considéré, faut-il pour cela nous interdire de nous questionner sur notre identité ? L’échec à mon avis, serait le refus de réfléchir. Chaque fois que nous refusons de réfléchir, c’est un échec. De tout temps, l’homme a fait usage de ses facultés intellectuelles pour avancer dans les méandres de la vie. Il est plus qu’étonnant qu’on s’interdise de raisonner sur une question aussi centrale que notre identité.
DEUXIEME PARTIE
LA FRANCE : ENTRE UNITE COMPLEXE ET COMPLEXITE UNIE
« La population française est un tissu composé de plusieurs ethnies, de plusieurs peuples régionaux rassemblés, auxquels se sont joints par les différentes immigrations depuis plus d’un siècle, des étrangers d’Europe et de pays plus lointains. Tant d’immigrés depuis notre Préhistoire jusqu’à l’Histoire très récente, ont réussi à faire un naufrage sans trop de bruit dans la masse française que l’on pourrait dire, en s’amusant, que tous les Français, si le regard se porte aux siècles et aux millénaires qui ont précédé notre temps, sont fils d’immigrés. »
F. Braudel
II-1: FAUT-IL CONTINUER CE DEBAT ?
La question était pourtant claire à la base. Qui est Français ? Répondre à cette question permet de se déterminer et de s’orienter. Se déterminer par rapport à sa relation avec son pays. S’orienter dans la dynamique et l’idéal de la République c’est–à-dire s’intégrer et aspirer à la Nation française qui se dessine.
Ce débat devait aussi aider à répondre à une autre question : comment devient-on Français ou mieux par quel mécanisme suis-je devenu Français ? La deuxième question renferme des éléments nécessaires pour répondre à la première. Il faut souligner, qu’il s’agit avant tout d’une invitation à soi-même. Il s’agit de sa propre image telle qu’elle se dessine sur le miroir de la Nation. La question s’adresse d’abord à soi-même avant de s’orienter vers l’autre. C’est là que le bât blesse. Car, nous ne sommes pas tous en mesure de nous poser les mêmes questions. Et même si, par miracle, nous y parvenions, nous n’aurions pas tous la même réponse. Se poser la question, bien plus y répondre, nécessite un effort qui peut selon les cas engendrer biens des tourments. Ce qui arrive souvent chez les êtres très faibles d’esprit, même si tout le monde est pourvu du bon sens selon Descartes.
Il est évident qu’un nouveau-né ne s’interroge pas sur sa nationalité, son pays, sa famille et toute autre chose qu’il n’a pas choisie. Mais, une fois devenu adulte, rien ne le dispense de se poser les questions sur son identité. A mon avis, c’est le début de son acceptation, de son affirmation et de son existence. Surtout, il faut le dire, il n’est pas obligé de rester Français. Car, le droit international permet à quiconque le souhaitant, s’il en correspond aux critères, de prendre la nationalité du pays dans lequel il vit à condition, bien sûr, que ce pays reconnaisse le droit du sol. Il aurait été important que ce droit soit affiché sur la place publique, c’est-à-dire porté à la connaissance de tous. Cela pourrait aider à comprendre certaines réalités qui dans certains cas dépassent le cadre français, car la France est signataire de plusieurs traités internationaux,34 ce qui l’engage à les respecter. Par conséquent, si certains étrangers ont choisi la France comme terre d’exil, ce n’est pas parce que les autorités françaises étaient mieux disposées que les autres, c’est au contraire, parce que ces autorités sont obligées, j’ai envie de dire, condamnées, à le faire.
II-2 : COMMENT DEVIENT-ON FRANÇAIS ?
En France on distingue aisément deux droits pour devenir Français le droit du sang et le droit du sol. Toutefois, il est important de noter que dans ce domaine, les textes changent à une vitesse qui dépasse la compétence des agents des Préfectures, qui parfois ne sont pas informés des dernières modifications. Par conséquent, je prends le risque de parler ici des derniers textes connus.
-Le droit du sang: c’est le droit qui confère à l’individu la nationalité française parce qu’il est issu d’un ou des deux parents biologiques français (cela n’a rien à voir avec la couleur de leur peau ou leur origine). Pendant l’année 2000 il y a eu 52 900 naissances des Français de naissance, parmi eux, 1560 étaient nés à l’étranger. Tout se fait sans le consentement de l’enfant. Ce n’est nullement son choix. Par ailleurs, il n’a aucun préalable, aucun devoir à remplir pour jouir de sa nationalité. Une chose est sûre, le nouveau-né ignore son identité et de celle de ses parents. Il a juste envie de vivre et de grandir heureux. Le vivre ensemble n’a pas de sens à son niveau. Les seuls qui comptent à ses yeux, ce sont ses parents. C'est l’école, si elle y arrive, qui va lui inculquer le sentiment d'appartenance à une communauté et qui pourrait développer en lui, s’il le souhaite par ailleurs, le sentiment du vivre ensemble. C’est là la mission la plus noble de l’école, former des Hommes, des bons Citoyens, des Français. Dans ce domaine, il n’y a aucune économie à réaliser.
De la même façon, ce sont les autres qui lui diront plus tard :
- Tu es Français. Et, il répondra sans doute,
- Cela veut dire quoi être Français ?
-Tes parents sont Français, tu es Français, donc, la France est ton pays.
-Ah bon, et Mamadou35 et Rachid36 aussi sont-ils Français? Les parents sans réfléchir répondent:
-Non, ce sont des étrangers, des immigrés, la France n’est pas leur pays. Ils ont quitté chez eux pour venir vivre chez nous.
Ce qui est intéressant dans cette attitude c’est le fait que le seul critère d’exclusion de Rachid et Mamadou soit la visibilité de leurs origines. C'est le cheminement de toutes les balivernes qui fabriquent des racistes.
Cet état de fait m’incite à considérer qu’une partie des Français jouissant du droit du sang ne se posent pas des questions sur les racines ou les fondements de leur appartenance à la France, bien moins sur ceux qui sont considérés, à tort, comme des étrangers ou des immigrés. C’est aussi pour cette raison que le débat choque ; car il ne s’agit plus d’être « Français d’origine », mais de se définir par rapport aux valeurs de la République.
-La naturalisation : ici, on distingue plusieurs cas. Mais quel que le soit le cas, il s’agit toujours des étrangers nés ici ou ailleurs (ce qui n’a rien à voir avec la couleur de la peau et les origines). En 2000, il y a eu 2 360 Français par acquisition parmi eux 1 560 étaient nés à l’étranger et 800 nés en France. Devenus Français, ils ne sont plus étrangers mais ils font toujours partie, statistiquement, de la population immigrée. Qui peut devenir Français ?
1-Un individu né en France de parents étrangers peut devenir français automatiquement à sa majorité, s’il est resté en France entre l’âge de 13 et 18 ans.
2-Un individu né à l’étranger de parents étrangers peut devenir Français suite à une adoption par des parents français.
3-Un individu né à l’étranger de parents étrangers peut devenir Français par suite d’un mariage avec un conjoint français.
4-Un individu né à l’étranger de parents étrangers peut devenir Français en s’engageant dans l’armée française.
5-Un individu né à l’étranger de parents étrangers peut devenir Français s’il le demande aux autorités françaises au bout de cinq ans de présence effective en France.
Il faut dire que dans le cas du droit de sol, la durée de cinq ans d’attente avant d’être candidat à la nationalité française ne commence qu’en tenant compte de la date de la régularisation de l’individu par la Préfecture et non de la date d’arrivée effective sur le sol français. Il se trouve que certains immigrés vivent dans la clandestinité, les sans-papiers, parfois depuis plus d’une dizaine d’années. C’est le temps nécessaire à certains, afin de remplir les critères indispensables pour être régularisés, c’est-à-dire être autorisés par les autorités françaises à résider en France. Dans ce cas, l’expression utilisée est « avoir des papiers » : porte de sortie de la clandestinité et du labyrinthe, qui pour beaucoup a la forme d’un ‘’chemin de croix’’.
Mais, la procédure de la naturalisation peut être exigeante et longue car il faut prouver son attachement à la France à partir de plusieurs critères. En somme, une vraie enquête de police. Si l’individu est ‘’sans défaut,’’ l’Etat lui accorde le droit d'être / de devenir Français. Il cesse dès lors d’être étranger et devient citoyen français de plein droit.
Durant cette phase, devenir Français est un choix et confère à l'individu déjà mature et conscient de sa démarche (exception faite pour des enfants adoptés), un sentiment d'appartenance à la communauté française.
C’est, forts de la connaissance de droits internationaux et des droits nationaux que les individus décident de devenir Français. Cela est loin d’être un cadeau de la République, n’en déplaise à certains, mais un droit inaliénable dans la mesure où ces étrangers remplissent les critères fixés par le droit international et le droit français.
Pour tous ceux qui deviennent Français par ce canal, la nécessité de se poser la question relative à l’identité nationale est urgente. D’abord, il s’agit de (renoncer ?) à l’ancienne identité. Pour cela, il faut y évoquer des raisons qui appuient cette démarche. Après, cela s’enchaîne une autre question : pourquoi devenir Français, pourquoi pas Anglais ou Belge… ?
Dans tous les cas, une fois devenu Français, une autre question survient : doit-on rester Français ? Les questions se suivent et se succèdent. Quelles sont les valeurs qu’on perd et quelles sont les valeurs qu’on gagne dans l’un ou l’autre cas ? Autrement dit, quelles sont les opportunités qui s’offrent ou qu’il faut saisir en tant que Français ? Les motivations sont multiples et variées selon les contextes.
Il ressort que les questions autour de l’identité nationale ne sont ni récentes ni choquantes pour ceux qui deviennent Français : elles sont au contraire permanentes.
Si donc ce débat étonne et choque au point d’attiser les passions et les tensions, c’est avant tout parmi les « Français aux corps traditionnels »37 et cela pour les deux raisons entre autres invoquées dans la première partie.
En somme, il y a des Français par héritage, ceux qui sont nés Français, indépendamment de leurs origines et ceux qui sont devenus Français, indépendamment de leurs origines. Être Français ou devenir Français ne confère pas plus de droits aux uns, que moins de droits aux autres. Les Droits de l'homme et du citoyen garantissent l'égalité en la matière.
L’individu devenu citoyen Français a les mêmes droits et les mêmes devoirs que tout autre Français. Dans un cas comme dans l’autre, il n’y a pas de Français inférieurs et de Français supérieurs. Cette vérité doit certainement choquer ceux qui considèrent toujours les non-Occidentaux (Africains, Asiatiques, Sud-Américains…) comme des étrangers et des immigrés au seul critère de leur différence. Pour ceux-là, même avec leurs cartes d’identité française, les non-Occidentaux resteraient des étrangers et des immigrés. En réfléchissant, j’en ai conclu que les esprits mettent du temps à évoluer. Par conséquent, on refuse de s’adapter, ce qui se traduit par l’exclusion des différences.
Il est urgent d’insister sur le fait qu’un étranger cesse d’être étranger dès l’acquisition de la citoyenneté française. La deuxième ambiguïté à lever porte sur le terme de droit de sang. Certains esprits rétrogrades seront tentés de comparer ce terme à toute connotation de couleur de peau ou toute affinité avec Vercingétorix ! Or, le sang français n’existe pas. On est Français, un point c’est tout.
II-3 : LE REFUS DE LA MIXITE COMME SIGNE EXTERIEUR
D’EXCLUSION
La mixité est une réponse imaginée par les hommes politiques afin d’éviter la « ghettoïsation»38 du pays. Il s’agit de donner une image de la France telle qu’elle apparaît au quotidien afin de la rendre acceptable et moins critiquable. A vrai dire, il s’agit (de faire croire) à tous que chacun à sa place dans la République, du moins en théorie. Mais, les faits sont têtus.
Par ailleurs nous savons que le changement de mentalité n’est pas imposé, mais voulu. C’est là où la France rétrograde de façon générale. Il suffit d’aller dans en Angleterre pour se rendre compte que les mentalités en France sont plus figées. Le refus de l’autre est caractérisé par son rejet. Certainement, c’est parmi les xénophobes qu’on trouve le plus grand nombre de gens qui n’ont jamais voyagé hors du territoire national. Ils refusent d’aller vers l’autre par peur de l’inconnu. Les racistes sont des citoyens du terroir par opposition au citoyen du Monde. Ces citoyens ethniques vivent par reflexe naturel, ce repli sur soi qui conduit à l’enfermement absolu. Point n’ait besoin de rappeler que l’enfermement absolu est plus dangereux que l’ouverture à l’autre. Dans ces conditions, le rejet de l’autre est le signe visible des esprits non évolués.
Enfin, prenons quelques exemples personnels pour illustrer ces propos. Quand je suis à Londres, c'est avec un réel plaisir que je salue des Français que j'y croise, par sentiment inavoué d'appartenance à une même communauté. Tout de suite, les conversations s'engagent parce qu'on se sent proche sans pourtant se connaître. Les mêmes Français, croisés en France, je ne les aurais sans doute pas salués spontanément ; eux non plus ne m’auraient pas salué sans difficulté.
Je ne fête le 14 juillet que lorsque je suis à l'étranger. La même fête en France, me laisse indifférent. Le drapeau français, en France, je ne le regarde presque pas. Et pourtant à l'étranger je prends le temps d’apprécier ses belles couleurs. Dans le même registre, je ne me rappelle pas avoir chanté La Marseillaise en France. Mais, quand je suis à l'étranger, il m'arrive de façon très volontaire de la chanter mais, aussi de l'apprécier, l'espace d'un séjour. Je pourrais multiplier des exemples.
Il ressort de cela un sentiment paradoxal qui se manifeste par mon appartenance et mon attachement à la France quand je suis hors de la métropole et un sentiment d'indifférence lorsque je suis en France. Cette indifférence peut s'expliquer par les regards de ceux qui se disent « vrais Français,» un regard de rejet à mon égard. Et mon inconscient, réagit par une indifférence totale à tout ce qui touche à la France en France. Ce sentiment est partagé par le Participant 9 : « Vivant à l’étranger depuis plusieurs années, je partage votre sentiment : on se sent beaucoup plus Français à l’étranger qu’en France.»
Ce sentiment peut aussi expliquer le fait que de nombreux jeunes Français « issus de l’immigration»39, s’expatrient à l’étranger, au départ pour trouver un simple stage, après, ils ne reviennent plus, car là-bas, ils ont des opportunités qu’ils n’auraient pas eues ici à cause de leurs origines. Le gros souci est que la France a investi énormément dans la formation de ces jeunes mais elle ne réalise aucun retour sur investissement. Qui perd ? Qui ga