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  • : AFRIQUE-PAUVRETE-AVENIR
  • : Ce blog traite des causes endogènes et exogènes liées à la pauvreté de l'Afrique. Il fait par ailleurs un pont entre l'Afrique et la France: la françafrique.
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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 12:33

Photob 001Il existe peu de sources pour comprendre ce qui s’est passé entre la destruction du Ghana (1076, Al Bakri) et
l’avènement du Mali en 1235. Seul Al Idrisi évoque la région en 1154. Plusieurs royaumes semblent prendre le relai,
dont notamment le Tekrur, le Sosso et surtout les Songhay qui fondent Gao à cette époque.
Le Mali émerge donc d’une période de désordre. Il est fondé par les Malinkés, un peuple de pasteurs et de
commerçants dont le territoire est idéalement placé, entre les régions productrices d’or et le Ghana. Le mot Mali aurait
plusieurs significations en Mandingue : « là où habite le roi » ou « hippopotame » référence à la noyade du fondateur
Sundiata Keita dans un fleuve, ou encore « ceux qui portent chance ». Les malinkés, eux, appelaient leur pays
« Manden ». Comme pour le Ghana, l’immense majorité des sources provient des voyageurs et géographes arabes.


2) Le rôle de Sundiata Keïta
La création du Mali est l’oeuvre de Sundiata Keita, un personnage à la fois historique et légendaire dont l’épopée reste
un grand classique des griots (lutte du roi lion contre l’usurpateur Sumanguru) De façon très classique, il fonde son
royaume en unissant les Malinkés contre un ennemi commun, le roi du Sosso, Soumaoro Kante, qu’il bat en 1235 lors
de la bataille de Kirina. Il se fait alors appeler « Mansa », ce qui signifie « roi des rois » et reprend globalement les
recettes qui ont réussi au Ghana : profiter d’un rôle de carrefour et contrôler des routes commerciales vers le Sahara et
vers les régions aurifères.
Son organisation du Mali autour de sa capitale, Niani, reprend elle aussi les grandes lignes de celle du Ghana : structure à la fois fédérale et féodale du royaume (provinces dirigées par des gouverneurs, appelés « farin » ou royaumes vassalisés, gardés par des garnisons mandingues) et administration efficace (ministres spécialisés aux compétences bien délimitées, secrétaires pour les relations écrites avec le monde musulman). Son armée aurait regroupé 100 000 hommes : aristocratie à cheval accompagnés d’archers ou de lanciers, chaque province devant fournir un contingent.
Il innove cependant sur certains points comme le contrôle de la population. Elle est divisée en 30 clans spécialisés qui
rappellent les castes: 16 clans d’hommes libres, 4 clans de griots, 5 clans de marabouts et 5 clans d’artisans. Il fige
donc la société en rendant les métiers héréditaires. Pour décrisper les relations sociales, il officialise le système de la
parenté à plaisanterie (impolitesse rituelle entre clans ou familles). C’est cependant surtout par la Charte du Manden
que le règne de sundiata Keïta est devenu légendaire. Ce texte poétique quelque peu anachronique place la vie et la
liberté au dessus de tout.


4) L’apogée du Mali
La dynastie des Keïta règne avec une seule interruption jusqu’en 1389. Elle choisit de conserver une mixité religieuse :
Les couches dirigeantes sont islamisées, ce qui facilite le commerce vers le Maghreb et le Moyen-Orient, mais le peuple reste fidèle aux croyances animistes. L’Islam est aussi utilisé comme un moyen de contrôle social, grâce à l’introduction de la Charia et des tribunaux islamiques au début du XIVe siècle. Cette religion permet également d’unifier les différentes ethnies qui composent l’empire : nomades sahariens (Mesufa, Berbères, Touaregs), nomades
sahéliens (Fulbe, Peuls) et agriculteurs (Tukuloor, Soninke, Songhay, Wolof et Mandingues).
Parmi les rois de la dynastie Keïta, on peut retenir Aboubakri II, qui lança deux expéditions pour explorer l’océan
Atlantique et ne revint pas de la seconde, et surtout Mansa Mussa (ou Kankan Mussa). Le Mali atteint son apogée sous
le règne de ce roi qui a marqué les chroniqueurs arabes lors de son pèlerinage à la Mecque en 1324- 1325. Sa suite de 8000 serviteurs a impressionné et sa prodigalité légendaire en or aurait provoqué une dévaluation durable du dinar en Egypte et en Arabie. Sous son règne, les villes de Gao et Tombouctou sont construites en s’inspirant de l’architecture arabe (brique et toits plats). Cette prospérité se poursuit sous le règne de Mansa Suleyman, bien connu grâce à la visite d’Ibn Battuta. Tombouctou atteint alors 170 000 habitants et compte plus de 150 écoles. Selon la tradition, 7077 villages auraient entouré la capitale, Niani. On estime alors la population de l’empire à 40 millions d’habitants.
Tout comme le Ghana, le Mali a fondé sa puissance sur le contrôle du commerce entre la zone équatoriale et le Nord de l’Afrique : on retrouve les mêmes règles (taxes, droit exclusif du roi sur les pépites) et les mêmes marchandises (cola, or, sel). Seule nouveauté, l’importance du cuivre, exporté des mines royales de Takkeda vers le sud.


5) le déclin du Mali
Après la mort de Mansa Suleyman en 1360, des querelles de succession qui dégénèrent en guerre civiles affaiblissent le Mali. Les peuples voisins, Mossis, Touaregs, Peuls et Songhays en profitent pour l’attaquer, ce qui a pour effet
d’étouffer peu à peu le commerce : perte de Tombouctou, Walata, Gao, puis de la Gambie qui permettait de commercer
avec les nouveaux arrivant portugais. Le Mali survit : le Mansa reste le souverain officiel de nombreuses chefferies et
reçoit des ambassades portugaises en 1495, mais il devient une puissance secondaire, contrôlant de moins en moinsde provinces, déclinant lentement jusqu’en 1546.

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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 12:15

Photob 001 les conditions de vie
Le paludisme et la tripanosomiase, véhiculée par la mouche tsétsé, font des ravages. Malgré quelques avancées
médicales, notamment à Jenné, sur le Niger (opération de la cataracte, découverte du moustique vecteur du
paludisme…), l’espérance de vie est faible.
La maison traditionnelle est circulaire, construite en banco (boue séchée), le toit pointu recouvert de chaume. Dans
les villes, à partir du XIIIe siècle, en parallèle à l’islamisation et aux pèlerinages à la Mecque, on imite de plus en plus
l’architecture arabe en brique et à toit plat. Il est difficile de se faire une idée précise de la taille réelles des villes: on
cite par exemple le chiffre de 10 000 habitants en l’an 1000 à Jenné- Jeno, 20 000 habitants à Kumbi Saleh au XIe
siècle et 170 000 à Tombouctou au XIVe siècle.


 religions et croyances
La croyance dominante reste l’animisme, malgré l’Islamisation progressive à partir du IXe siècle. On croit en un créateur unique, qui a insufflé un esprit en toute chose, animée ou non. Le culte des ancêtres est très important également. Les croyances magiques sont généralisées, notamment celles qui entourent les forgerons, respectés mais ostracisés. L’islam, au début religion non exclusive des élites, se répand peu à peu sans jamais éradiquer tout à fait les croyances animistes. Des royaumes qui pratiquent un Islam très rigoureux (Songhay) cohabitent donc avec des royaumes animistes ou mixtes. Dans la plupart des cas, il semblerait que les choix religieux soient avant tout une affaire d’intérêt bien compris par les rois: rester animiste permet d’être divinisé, mais devenir musulman permet de développer le commerce.
Ces croyances ont une influence profonde sur l’organisation sociale, centrée sur le clan dirigé par les anciens. Là
encore, l’islam et la Charia ne font que se superposer aux anciennes coutumes : la responsabilité familiale ou clanique d’un crime, le règlement d’un conflit par compensation financière restent la règle. L’obsession de la descendance et de la fécondité féminine conduisent à une polygamie fréquente qui retarde l’âge au mariage des garçons et crée des frustrations que de nombreuses coutumes s’emploient à atténuer. Malgré l’islamisation, les lignées restent matrilinéaires et la succession souvent collatérale.


 art et architecture
Première difficulté, il n’y a pas d’art du Ghana, et pas plus un art du Mali, du Songhay ou du Monomotapa. Il y a des
arts, qui correspondent aux traditions très variées des ethnies qui composaient ces empires. Seconde difficulté,
contrairement à d’autres civilisations africaines, il ne semble pas que des empires aient suscité des formes d’art en
matériaux durables. Troisième et dernière difficulté, les sources arabo – musulmanes n’évoquent que très rarement l’art de ces peuples considérées comme inférieurs. Leurs traditions, leur culture ne sont également évoquées que pour s’étonner ou s’horrifier, par exemple du statut des femmes ou de leurs habits.
L’art et l’architecture des royaumes subsahariens peuvent cependant être abordés par l’étude des quelques traces
laissées dans les sources, complétées par les fouilles archéologiques. Dans les deux cas, sans aller jusqu’à un
syncrétisme, il apparaît que l’expansion de l’Islam n’a jamais empêché la survivance dynamique des croyances
préexistantes, et ce d’autant plus que les royaumes étaient tous pluriethniques. Au Mali, par exemple, des Griots
masqués intervenaient à la cour du Mansa lors de l’Aïd el Fitr ! Les cérémonies d’initiation et les sociétés secrètes ne
disparaissent pas lorsque l’Islam devient dominant, chez les Songhay par exemple. Les rites funéraires témoignent
également de cette coexistence : des jarres funéraires accompagnées d’offrandes, datant du XVe siècle on ainsi été
retrouvées près de Djenné, au coeur des empire Du mali et Songhay.

 

Des figurines en terre cuite ont également été retrouvées, surtout dans le delta intérieur du Niger, dans un contexte
islamique. Elles semblent avoir été enterrées pour s’assurer la solidité des murs ou l’appui des ancêtres, et non
détruites pour les remplacer par une autre religion. Souvent retrouvées dans un contexte domestique, on peut leur
attribuer une fonction de protection et penser qu’elles sont l’indice de la survie d’un culte domestique animiste
concomitant d’un culte public musulman. Certaines d’entre elles, couvertes de pustules ou visiblement en extase,
témoignent de pratiques de guérisons fort peu orthodoxes. Le motif du serpent apparaît très souvent, lié à des
pratiques magiques.

 

En matière d’architecture, le mélange des civilisations arabes et subsahariennes est aussi perceptible. Des mosquées rondes, construites sur le plan traditionnel d’une case, on été retrouvées. Les mosquées encore existantes à Tombouctou ou Djenné ont un plan plus classique, mais des méthodes de construction typiques du delta du Niger, à
savoir des murs en banco renforcé par du bois, condamnés à une disparition rapide faute d’un entretien permanent.

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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 12:01

Photob 001Les royaumes sahéliens sont mythiques pour les européens : ils sont inaccessibles jusqu’au XVe siècle du fait d’une
triple barrière : le Sahara, les royaumes musulmans et les courants contraires de l’Atlantique. Les cartes européennes
du début XVIe siècle sont donc totalement fantaisistes : mélange entre les renseignements d’Hérodote, de Ptolémée et
les mythes parabibliques des mines de Salomon ou du royaume du prêtre Jean.
Hormis les fouilles archéologiques qui se multiplient ces dernières années, nous connaissons l’histoire de ces royaumes avant tout par l’entremise des Arabes. Des sources à considérer avec prudence : tout comme pour les européens de l’époque, tout le sud du Sahara porte pour eux un fort parfum de mythe. Ce sont néanmoins les Arabes qui ont donné son nom à cette partie de l’Afrique. Pour eux, elle porte deux noms : « Sahel », qui signifie « rivage » et « Bilal el
Sudan » qui signifie « pays des noirs ». Nous disposons grâce à eux de descriptions précises sur certains points, à
certaines dates : difficile, donc, de faire une histoire complète des royaumes. Le point de vue islamocentriste adopté
par ces géographes introduit également un biais fort gênant. Ils nous ont néanmoins laissé quelques fort belles cartes…

Dernière source, locale et vivante, l’histoire orale véhiculée depuis des siècles par les griots. Là aussi, la prudence
s’impose.
 Un vocabulaire européen qui ne correspond pas à la réalité africaine
Des mots aussi simples que roi, empire et capitale prennent ici un autre sens:
- Un roi ressemble à un chef de famille, de clan, de village : il gère les biens, prend les décisions après avis des
anciens et communique avec les esprits des aïeux. (Il a donc un rôle religieux sans tenir forcément son pouvoir
des dieux). Même s’il utilise sans vergogne la violence pour imposer son autorité, son pouvoir n’est pas absolu
car il doit composer avec la tradition et tenir compte de lois orales.
- Une capitale reprend l’organisation d’un village à une échelle plus grande. Un palais royal n’est rien de plus que
la maison d’une famille, en plus monumental. Sauf exception, même pour les monuments les plus importants,
les techniques de construction sont les mêmes que celles d’une maison, à base de terre et de bois (le banco).
De quoi compliquer sérieusement la tâche des archéologues.
- Un empire n’est pas à proprement parler un territoire: En effet le roi africain ne dirige pas tant une terre que
des hommes. A la différence de l’occident médiéval, la terre n’est donc pas l’élément déterminant du pouvoir.

Cela se comprend dans la mesure où la pauvreté des sols oblige à déménager fréquemment les villages
(« shifting cultivation »). Un empire peut donc s’agrandir ou rétrécir très vite, selon la personnalité, l’aura du
roi. La terre n’est donc pas le moteur de l’évolution économique. Il n’existe pas plus d‘unité ethnique et l’unité
culturelle n’est pas recherchée (coexistence systématique de l’Islam et de l’animisme). Un empire africain
médiéval ne possède donc pas de frontières et n’a pas de nom. Les noms que nous utilisons aujourd’hui sont
ceux donnés par les Arabes et ont été forgés à partir du titre que portait le roi.


 une mémoire très vive en contrepoint d’un déni
Les histoires de ces royaumes sont aujourd’hui un enjeu mémoriel de premier ordre en Afrique. Ils sont souvent utilisés
pour justifier des nationalismes parfois racistes et violents. Le Ghana a récupéré le nom de l’empire sans en avoir les
frontières. Certains maliens rêvent d’en « grand Mali » purifié de « races » étrangères. Des Soninkés ou des Malinkés
pensent à une revanche contre les berbères ou les marocains. Le Monomotapa est un club de football aux supporters
assez excités pour croire en une reconstitution de l’empire. On va jusqu’à prétendre que ce sont les expéditions
maliennes qui ont découvert l’Amérique, comme en témoigneraient certains traits des civilisations amérindiennes.
Certaines de ces exagérations s’expliquent sans doute par la volonté de contrebalancer les effets de la colonisation
européenne : malgré les recherches précoces et les conclusions souvent visionnaires de quelques chercheurs, la
majorité des européens était et reste persuadé que l’Afrique n’a pas d’Histoire précoloniale. En témoigne par exemple
le refus d’accepter que le Zimbabwe puisse avoir été construit par des noirs. Certains auteurs préfèrent faire appel au
roi Salomon ou aux Phéniciens plutôt que de l’accepter. Autre exemple très parlant, la première histoire du
Monomotapa, écrite par A. Wilmot en 1896 comporte trois chapitres intitulés « les Phéniciens », « les Arabes », « les
Portugais »…Toute civilisation africaine serait donc nécessairement exogène ! Sans doute préfère-t-on oublier que
l’empire du Ghana, contemporain de celui de Charlemagne, était le plus vaste des deux.

 

 des traits communs entre les quatre royaumes

 

1) le commerce
a) le commerce intra africain
Le commerce est structuré par les fleuves Sénégal et Niger sur lesquels des pirogues assurent le trafic. Pour la
traversée du Sahara (entre 25 et 50 jours) les chameaux (de 1000 à 12000 par caravane) et les baudets prennent le
relais.

Plusieurs monnaies sont utilisées: le cauris (coquillage venant de l’océan Indien), le sel, des barres de cuivre, la poudre d’or, le dinar d’or ou le troc. Le commerce silencieux ou « à la muette » est fréquent au début du Moyen Age. Les royaumes saheliens disposent rarement de ressources sur leur sol. Ils s’enrichissent en jouant le rôle d’intermédiaires :
par exemple l’or du Bambouk et du Tekrour, dont la provenance précise est soigneusement cachées par les peuples qui exploitent les mines sont échangés contre le sel du Sahara. Or, sel, esclaves, ces trois marchandises forment la base du commerce transsaharien.


b) Les traites orientales :

 

le Moyen Age, surtout à partir de l’expansion musulmane, voit se créer un grand commerce international des esclaves
noirs, de l’Atlantique à la mer Rouge, suivant durant près de 13 siècles les mêmes routes transsahariennes et
maritimes. Un commerce d’une stabilité et d’une durabilité exceptionnelle, donc, rendu possible par l’importance du
« réservoir de main d’oeuvre » que constitue l’Afrique Subsaharienne, mais aussi par des facteurs moraux et
économiques. Facteur moral : La Charia interdit de réduire un musulman à la condition servile, a contrario tout infidèle
est un esclave potentiel. Dans le monde musulman, les captifs noirs razziés au sud du sahara étaient donc les plus
nombreux. Facteur économique : La guerre et le commerce sont les deux moyens d’enrichissement privilégiés des
souverains des royaumes subsahariens, ce qui est également valable pour leurs guerriers et leurs marchands : la traite
est donc à l’intersection de ces deux activités fondamentales, même si Pétré-Grenouillot souligne que le plus souvent,
les esclaves sont plutôt un « sous produit » qu’un but de guerre.
Outre les conflits, la traite peut être alimentée par l’esclavage tributaire, les dettes ou des condamnations, par exemple
pour sorcellerie. La « production » d’esclaves est donc intensive, soit pour le marché domestique, soit pour l’exportation
vers les pays musulmans. Dans les royaumes sahéliens, les captifs deviennent domestiques, soldats, mineurs,
cultivateurs ou fonctionnaires. Leur carrière peut parfois être brillante : pour contrebalancer l’influence de l’aristocratie
héréditaire, les rois aiment en effet s’entourer de hauts dignitaires esclaves qui leurs sont tout dévoués.
Pour l’exportation, d’après Ibn Battuta, on les convoie dans des caravanes de 600 esclaves qui traversent le Sahara en
deux mois et demi, au prix d’une forte mortalité (de 6 à 20%). Les femmes de certaines ethnies sont particulièrement
appréciées à la cour des Fatimides ainsi que les eunuques noirs, mais plus nombreux sont ceux qui travaillent dans
l’agriculture (notamment l’entretien des structures d’irrigation) ou deviennent artisans, mineurs (sel, or) ou soldats.
D’autres esclaves font le trajet inverse : des Mamluks turcs forment ainsi la garde personnelle du roi Songhay, dont le
harem est en partie composé d’esclaves venant d’Egypte.
Les estimations du nombre d’esclaves vendus en Afrique occidentale sont sujet à polémique : selon les auteurs, les
chiffres varient de 10 000 à 20 000 par an durant toute la période médiévale (20 millions entre 650 et 1920, dont 9
millions pour la traite transsaharienne et 3 millions pour l’esclavage interne.)

 

c) Et l’Europe ?
Quasi absents au XIIe siècle, des marchands européens accèdent peu à peu au commerce africain en ouvrant des
comptoirs dans les villes du Maghreb. Au XVe siècle, par exemple, on trouve à Oran des marchands catalans,
majorquins, castillans, génois, vénitiens, pisans et marseillais Si tous se pressent ainsi dans le Maghreb, c’est bien pour l’or africain, dont l’importance pour l’économie européenne doit être questionnée. On sait bien que cet or a une
importance primordiale pour les souverains maghrébins. Il leur permet de mener une politique de prestige passant par
un monnayage d’or intensif. Pour les villes marchandes européennes, quelques chiffres montrent que cet or n’est pas
moins important : En 1377, le bénéfice net du commerce génois avec l’Afrique s’élève à 68 000 livres. Durant tout le
XVe siècle, la valeur globale du commerce africano-catalan dépasse 500 000 dinars par an. Outre le commerce, l’or
africain passe dans l’économie européenne par l’entremise des tributs versés par les royaumes maghrébins aux
souverains castillans ou aragonais. La location de flotte de guerre ou de mercenaire est également très lucrative.
Le monopole des marchands arabo-berbères sur le commerce transsaharien gêne cependant autant les rois du Mali et du Songhay que les Européens : dans les deux cas, il s’agit d’un monopole mal vécu. Ambassades, envois de cadeaux et autres échanges de lettres ont cependant peu d’effets.
Il en va de même dans l’océan indien, que les souverains successifs du Caire interdisent aux marchands européens.
Dans cet océan, un grand commerce très actif est en place autour des deux plaques tournantes que sont Aden et Kilwa.
Les commerçants Arabes, Indiens, Indonésiens et Chinois (7 expéditions de Cheng Ho entre 1405 et 1433) viennent y
échanger épices, soie et porcelaine contre du fer, du bois, de l’ivoire et surtout l’or du Monomotapa, dont la production
est estimée à 10t/an durant tout le XVe siècle.

 

On comprend donc pourquoi les marchands européens, Portugais et Génois en tête, tentent une stratégie de
contournement par l’Atlantique au XVe siècle. Jusqu’en 1434, le cap Bojador ne peut être franchi du fait des alizés, des
anticyclones et des navires trop peu maniables. Et le fait est qu’une fois cet obstacle franchi, les marchands portugais
vont être déçus par les petits bénéfices qu’ils réalisent, incapables qu’ils sont de détourner le commerce transsaharien.
C’est, entre autres, ce qui va les pousser, de déception en déception, d’eldorado en royaume du prêtre Jean, jusqu’au
Monomotapa et jusqu’à l’Inde. On comprend également pourquoi, déçus, ils se tournent vers le commerce plus
rentable des esclaves.
Ce commerce n’est pas une nouveauté, puisque certains esclaves noirs atteignent l’Europe dès le Moyen Age. On
signale par exemple 23 esclaves noirs à Catane en 1145 ; d’autres au XIVe en Roussillon, alors qu’à Naples au XVe,
83% des esclaves sont noirs. C’est durant ce XVe siècle que ce commerce, mené par les Catalans, les Portugais et les Génois, va se développer. Les noirs « de Guinée », acheminés par l’Atlantique, sont de plus en plus nombreux sur le marché. On en vend par exemple 800 à Valence en 1495. Mécaniquement, leur prix baisse (de 1 cheval pour 6 esclaves à 1 cheval pour 15 esclaves) et on leur réserve les travaux agricoles les plus durs. La hausse de la demande
européenne entraîne alors d’importants bouleversements dans société africaine, puisque pour payer les produits
d’importations européens, la chasse aux esclaves devra s’intensifier
En Afrique occidentale comme dans l’océan Indien, l’arrivée des européens va donc perturber un système commercial
international bien établi et contribuer à l’affaiblissement des royaumes qui en vivaient.

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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 11:55


Photob 001Les espaces étudiés sont islamisés dès le Xe s par des Berbères donc relation avec l’Islam du chapitre I.
Ne pas entrer dans le détail de l’histoire des royaumes.
C’est un espace complètement intégré au monde de la méditerranée (sauf le Nigéria)
L’exemple de l’empereur du mali et de son séjour au Caire avec son or explique en partie l’intérêt du
Portugal de longer les côtes de l’Afrique pour trouver « ce royaume d’or ».


CONNNAISSANCES
Une civilisation de l’Afrique subsaharienne (au choix), ainsi que les grands courants d’échanges des marchandises,
saisis dans leurs permanences (le sel et l’or du Soudan, les esclaves…) entre le VIIIe et le XVIe siècle.
Les traites orientale, transsaharienne et interne à l’Afrique noire : les routes commerciales, les acteurs et les
victimes du trafic.


DÉMARCHES
L’étude articule le temps long de l’histoire africaine entre le VIIIe et le XVIe siècle et l’exemple, au choix, d’une
civilisation de l’Afrique subsaharienne parmi les suivantes :
- l’empire du Ghana (VIIIe - XIIe siècle) ;
- l’empire du Mali (XIIIe- XIVe siècle) ;
- l’empire Songhaï (XIIe – XVIe siècle) ;
- le Monomotapa (XVe - XVIe siècle).
L’étude de la naissance et du développement des traites négrières est conduite à partir de l’exemple au choix d’une
route ou d’un trafic des esclaves vers l’Afrique du Nord ou l’Orient et débouche sur une carte des courants de la
traite des noirs avant le XVIe siècle.


CAPACITÉS
Connaître et utiliser les repères suivants
- La période et la situation de la civilisation de l’Afrique subsaharienne choisie par le professeur
- La conquête et l’expansion arabo-musulmane en Afrique du Nord et en Afrique orientale
- Carte de l’Afrique et de ses échanges entre le VIIIe et le XVIe siècle
Décrire quelques aspects
- d’une civilisation de l’Afrique subsaharienne et de sa production artistique
- de la traite orientale ou de la traite transsaharienne


PROBLÉMATIQUES
Cette partie du programme s’articule autour de deux points fortement liés l’un à l’autre, l’étude d’une civilisation de
l’Afrique subsaharienne, une première étude des traites négrières avant le XVIe siècle.
Il s’agit de redresser les clichés qui existent sur ces deux points : les colonisateurs du XIXe siècle ont longtemps
présenté l’Afrique comme un vide civilisationnel, par conviction et pour justifier le rôle civilisateur de l’Europe ; les
traites sont trop souvent réduites à l’espace atlantique, en oubliant celles qui auparavant ne concernent que
l’Afrique et qui jouent un rôle essentiel dans le fonctionnement des civilisations africaines.
Dès lors, cette étude comporte trois enjeux majeurs : étudier un exemple de civilisation africaine fortement
méconnue ; voir les similitudes et les originalités de cet exemple africain par rapport aux exemples plus
classiques de l’Occident médiéval et de la civilisation musulmane, entrer dans l’histoire globale en montrant le
fonctionnement des traites négrières qui touchent à plusieurs aires de civilisation successives dans le temps et
dans l’espace.



SUPPORTS D’ÉTUDE
Les documents utilisables sont d’ordre iconographique (Portulan de Charles V ; images d’art africain, images
européennes ou orientales…), archéologique (ruines) et textuel (sources diverses souvent méconnues). D’autres
supports documentaires (reconstitutions, mosquée actuelle de Tombouctou…) sont bien sûr aussi utilisables.
Le débat sur les sources concernant l’Afrique a longtemps été faussé par l’idée que les Africains n’avaient pas
produit d’écrits ce qui rendait impossible l’écriture d’une histoire africaine. C’est après la Seconde Guerre mondiale,
avec notamment le travail d’intellectuels africains formés aux méthodes historiques, qu’une autre vision voit peu à
peu le jour. On a reconnu ainsi la validité des sources orales, établi que les sources écrites étaient plus
nombreuses que ce que l’on pensait (inscriptions dans la pierre, récits antiques, sources arabes médiévales,
nombreux récits historiques locaux d’Africains eux-mêmes retrouvés récemment, sources écrites d’origine
européenne) et bien sûr donné à l’archéologie toute sa place pour compléter et confirmer les sources écrites et les
traditions orales.
Parmi les civilisations proposées, trois sont des civilisations sahéliennes. Celle du Ghana présente la particularité
d’être antérieure à la colonisation du Sahel alors que l’empire du Mali et l’empire Songhaï sont officiellement
musulmans. Le Monomotapa est un ancien État de la région du Zambèze, ouvert sur la côte est de l’Afrique.
Dans le cadre de la civilisation choisie, le professeur peut mettre en valeur les points suivants : son extension
(importance du support cartographique) ; les modalités du pouvoir ; la richesse et la participation aux grands circuits
des échanges ; les réalisations artistiques et architecturales ; les contacts avec le monde arabo-musulman.
L’essentiel est de montrer que l’Afrique subsaharienne a donné naissance, dans les siècles correspondant
au Moyen Âge européen, à des civilisations brillantes et originales.
L’empire du Mali (XIIe-XIVesiècle) a été, par exemple, un État réputé jusqu’en Europe, surtout à son apogée lors du
règne du célèbre Kankan Moussa, représenté à l’égal d’un roi européen sur un portulan de 1375. De fondation
légendaire, toujours chanté par les griots actuels, cet empire a fondé sa puissance sur le contrôle du commerce de
l’or et des grandes villes du négoce transsaharien, dominé un gigantesque territoire (de l’Atlantique à l’est du Niger
actuel), et développé une civilisation brillante attirant lettrés, juristes et savants.
Parmi les grands courants d’échanges, la traite transsaharienne en direction du Maghreb et les traites orientales
par le Soudan et l’Égypte ou par l’océan Indien et les différentes formes d’esclavage qu’elles alimentent dans
monde arabo-musulman feront l’objet d’une étude spécifique.
On peut traiter cette partie du programme en présentant une civilisation puis en abordant une route de la
traite qui la concerne ou, au contraire, ne partant d’une telle route puis en montrant comment une empire
s’en est assuré la maîtrise.


PIÈGES À ÉVITER
− développer toute l’histoire de l’Afrique subsaharienne ;
− isoler la civilisation choisie des grands courants d’échange ;
− se lancer dans des comparaisons hasardeuses qui introduiraient des représentations contemporaines sans
rapport avec les acquis de la recherche.


POUR ALLER PLUS LOIN
• Boilley Pierre et Chrétien Jean-Pierre, Histoire de l’Afrique ancienne, VIIIe-XVIe siècle, Documentation
photographique n° 8075, 2010
• Pétré-Grenouilleau Olivier, Les traites négrières, Documentation photographique n° 8032, 2003
• Pétré-Grenouilleau Olivier, Les traites négrières, Essai d’histoire globale, Gallimard, 2004
• Ki-Zerbo Joseph, Histoire générale de l’Afrique, L’Afrique du 7eau 11e, tome 3, Unesco, 2005
• Ki-Zerbo Joseph, Niane Djibril-Tamsir, Histoire générale de l’Afrique, L’Afrique du 12eau 16e, tome 4, Unesco,
2010
• Simonis Françis (dir.), Comprendre l’Afrique soudanaise au Moyen Âge. Le temps des grands empires (Ghana,
Mali, Songhaï), Sceren-CRDP Aix-Marseille, 2010
• Site du Musée Dapper,

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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 11:34

Photob 001Etude Empereur Mansa Musa
L’empire du Mali (XIIe-XIVesiècle) a été un État réputé jusqu’en Europe, surtout à son apogée lors du
règne du célèbre Kankan Moussa, représenté à l’égal d’un roi européen sur un portulan de 1375. Cet
empire a fondé sa puissance sur le contrôle du commerce de l’or et des grandes villes du négoce
transsaharien. Il domine un gigantesque territoire (de l’Atlantique à l’est du Niger actuel). L’empire du
Mali a développé une civilisation brillante attirant lettrés, juristes et savants.


Aux XIIIe et XIVe siècle, l'empire du Mali s'étend sur un vaste territoire à l'ouest de l'Afrique. L'empereur du
Mali (le mansa) règne sur le pays depuis sa capitale, Niani. Il s'appuie sur des gouverneurs à l'intérieur de
l'Empire, et sur des royaumes vassaux à sa périphérie. Il dispose d'une armée considérable de fantassins et de
cavaliers.
L'Empire est prospère grâce à ses importantes mines d'or et au commerce (esclaves, noix de cota, sel...).
Les produits sont échangés aux marchands berbères et arabes dans les villes aux portes du désert, surtout
Tombouctou (DOC. q et Gao. L'empereur, qui dispose d'une partie de l'or du pays, est très riche et possède de
nombreux esclaves.
La population est musulmane et on construit dans l'Empire des mosquées dans un style propre au Mali. Les
artisans fabriquent aussi des sculptures originales représentant des figures humaines.

 

 

Kanga Moussa est le dixième « mansa » (roi des rois) de l'empire du Mali de 1312 à 1332 ou 1337. Lors de sonmali_empire_mansa_musa.jpg
ascension sur le trône, l'empire du Mali est constitué de territoires ayant appartenu à l'empire du Ghana et à
Melle (Mali) ainsi que les zones environnantes. Moussa porte de nombreux titres, émir de Melle, seigneur des
mines de Wangara, ou conquérant de Ghanata, Fouta-Djalon et, d'au moins une douzaine d'autres régions. Il
porte l’Empire du Mali à son apogée, du Fouta-Djalon à Agadez et sur les anciens empires du Ghana et des
Songhaï. Il établit des relations diplomatiques suivies avec le Portugal, le Maroc, la Tunisie et l’Égypte.
Considéré comme l'un des souverains les plus richissimes de son époque, son règne correspond à l'âge d'or de
l'empire malien.


Signification du nom Kanga Moussa
Kanga Moussa signifie « Moussa, fils de Kankou » en référence à sa mère, d'autres variantes de ce nom sont
Kankou Moussa et Kankan Moussa. Il est la plupart du temps désigné sous le nom de Mansa Moussa dans les
textes historiques européens et dans la littérature. D'autres variantes de son nom telles que Mali-koy Kankan
Moussa, Gonga Moussa et le « lion du Mali » existent.


manife5.jpgPèlerinage à la Mecque de Kanga Moussa
Le pèlerinage à la Mecque de Kanga Moussa le rendra célèbre en Afrique du Nord et dans le Proche-Orient. Il
part pour l'Arabie en 1324, sa suite comprend 60 000 hommes, 12 000 esclaves, des hérauts vêtus de soie et
porteurs de bâtons d'or s'occupent des chevaux et des sacs. Moussa fournit tout ce dont a besoin la procession,
fournissant nourriture aux hommes et aux animaux. Au sein de la caravane se trouvent aussi, selon certains
récits 80 dromadaires portant entre 50 et 300 livres d'or en poudre chacun. Dans chaque ville qu'il traverse,
Moussa offre ses richesses. Il est aussi indiqué qu'il construit une nouvelle mosquée chaque vendredi, quelle
que soit la localité où il s'arrête ce jour-là.
Plusieurs témoins directs rendent compte de son voyage. Ils sont tous impressionnés par la richesse du
souverain et par l'importance de sa suite, dont le souvenir est rapporté dans de multiples sources.
Cependant, la générosité de Moussa provoque des effet secondaires dévastateurs, ruinant l'économie des
régions qu'il traverse. Au Caire, à Médine et à La Mecque, l'afflux soudain d'or provoque une dévaluation de ce
métal qui durera pendant dix ans. Le prix des biens de consommation connaît une forte inflation, le marché
tentant de s'adapter à l'afflux de richesses accompagnant la venue du roi malien. Afin de rectifier le cours de l'or,
Moussa emprunte à haut intérêt tout l'or qu'il peut emporter aux prêteurs du Caire. C'est la seule fois dans
l'histoire qu'un homme contrôle directement le prix de l'or du bassin méditerranéen.

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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 10:00

 

 

L’appel à la croisade

 

 

Il est urgent d’apporter à vos frères d’Orient1 l’aide si souvent promise. Les Turcs et les Arabes lesimages (6) ont attaqués et saccagent le royaume de Dieu. C’est pourquoi je vous supplie, les pauvres comme les riches, de vous hâter de chasser ces peuples néfastes des régions habitées par nos frères. Je le dis à ceux qui sont ici, je le proclamerai aux absents : le Christ l’ordonne. Si ceux qui iront là-bas perdent leur vie pendant le voyage sur terre ou sur mer ou dans la bataille contre les païens2, leurs péchés leur seront pardonnés.

 

 

 

D’après Foucher de Chartres, Histoire du pèlerinage des

Francs à Jérusalem, XIIe siècle

  1. Chrétiens de l’Empire byzantin 2. Non chrétiens

 

 

 

La prise de Jérusalem

images--7-.jpgNous sommes parvenus à Jérusalem le 7 juin et nous avons assiégé la ville. Le duc

Godefroy prit place à l’ouest. Nos seigneurs étudièrent les moyens d’attaquer la

ville afin de pouvoir y pénétrer pour aller adorer le tombeau du Christ. Godefroy fit

construire des châteaux de bois et autres engins. L’assaut a été donné le 15 juillet.

Les nôtres poursuivirent les infidèles en les tuant jusqu’au temple de Salomon, où il


 

y eut un tel carnage que l’on marchait dans le sang jusqu’aux chevilles. Les croisés

coururent bientôt par toute la ville, raflant l’or, l’argent, les chevaux et pillant les

maisons qui regorgeaient de richesses.


D’après l’Histoire de la première croisade, XIIe siècle

 

 

 

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