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  • : AFRIQUE-PAUVRETE-AVENIR
  • : Ce blog traite des causes endogènes et exogènes liées à la pauvreté de l'Afrique. Il fait par ailleurs un pont entre l'Afrique et la France: la françafrique.
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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 13:01

 LA COLONISATION

 

Photob 001Ces trois objectifs définis entre abolitionnistes et négriers devaient donner naissance à un autre système d’exploitation. Il est clair, au vu des éléments exposés ci-dessus, que les abolitionnistes ont été à l’origine du développement de la domination occidentale sur l'Afrique, par le biais du colonialisme. Dans cette perspective, la colonisation doit être  comprise comme un substitut   à la traite des Noirs. Elle a donc ouvert la voie à de nouvelles formes de domination, compte tenu de l’inégalité des rapports de forces européennes et africaines. Je parle de l’organisation politique, économique, sociale mais aussi culturelle, mentale et spirituelle du fait de la domination, la soumission absolue, qui crée la dépendance via l’aliénation imposée.

Ou bien, les abolitionnistes luttaient, ou voulaient lutter, contre la traite par la diffusion des principes évangéliques (en Grande-Bretagne), ou inspirés par le dynamisme des Droits de l’homme (en France). Mais, la puissance des intérêts économiques des Etats européens ont englouti les Africains, noyés dans la nouvelle forme de domination de l’ Occident sur l’Afrique.

Ou bien, ils jouaient le jeu et par conséquent étaient conscients de participer à la domination des Occidentaux sur les non-Occidentaux en substituant un mode de domination à un autre.

La transition entre ces deux modes de commerces, fut sans doute facile. Pour le négrier, devenu colon, l’activité légalisée, les affaires se relancent. Dans tous les cas, il s’agissait d’une réorientation des besoins.

Pour le colonisé, si on lui épargne les atrocités de la traversée, la terreur est la même. Les Africains pratiqueront des corvées et ils subiront les violences, l’humiliation, le mépris quotidien proche du bannissement, la christianisation ou islamisation à outrance. Mais le plus grave c’est le ‘’lavage de cerveau,’’ l’effacement identitaire qui entraîne la déchirure et la destruction morale et sociale de l’Etre africain. L’innommable fut commis, l’indicible, le broyage des Koongos et leur chosification. Les révoltés, inspirés par Kimpa Nvita sont capturés, ligotés parfois brûlés vifs ou disséqués, ce fut le cas de Mabiala Ma-Nganga. Ils moururent souvent en prison comme Bouéta Mbongo, André Matwua1, Simon Kimbangu2. Les exécutions publiques se sont multipliées pour décourager toute remise en cause du système basé sur la suprématie de l’Eurpéen.

Et pour être plus humilié, le Nègre doit apprendre et répéter qu’il est un être inférieur dans l’ordre de la création (voir, par exemple, l’enfant maudit de Noé d’après la Bible hébraïque3). Et admettre à la même occasion que « la race blanche, est la plus parfaite des races humaines. »4 La théorie de la race supérieure, teintée de xénophobie a engendré Hitler qui à son tour a précipité le monde dans la guerre la plus effroyable de l’Histoire.  

Le comble a été poussé presque jusqu’à l’extrême, quand il a s'est agi d’établir une corrélation entre l’intelligence, la beauté et la couleur de la peau. Quelle misère ! C’est le Blanc, seul, qui est intelligent et beau. Il y a encore des millions d'imbéciles qui pensent comme cela, et ils ont trouvé en face d’eux des Noirs assez faibles d’esprit pour blanchir leur peau.

Tant que l’on a conçu l’existence de races inférieures, il était indispensable de les civiliser. Les civilisateurs étaient ceux qui avaient reçu de la nature le don de rendre les autres plus ou moins humains. C’est le début de la politique de l’assimilation.

De la colonisation, comme exploitation économique, on basculait dans l’assimilation comprise comme signe de domination culturelle : l’aliénation. Or, ôter à l’homme sa culture, c’est effacer son identité, lui faire perdre tous ses repères. Aujourd’hui, l’Africain à force d’assimiler, volontairement ou involontairement l’Européen, a cessé d’exister par lui-même. Il a perdu tout simplement son identité. Par conséquent, il ne lui reste qu’à s’intégrer. S’intégrer à quoi ? En France, l’intégration d’un non-Occidental est réussie quand il cesse de vivre par lui-même pour vivre comme les autres à condition que les autres soient des Français, j’allais dire les « Français blancs. » Peut-on encore résister quand on n’a plus de repères où s’accrocher ?

Il est clair que la colonisation n’était pas une action civilisatrice, mais bien l’exploitation et la domination dans tous les sens du terme de l’Africain noir et ses terres.

Comment, pouvait-il en être autrement, dès l’instant que l’on sait que la majorité des colons étaient d’anciens oppresseurs, restés sur le continent africain.

A Berlin, en 1885, le partage du royaume des Koongos fut officialisé entre les trois pays colonisateurs : le Portugal, la Belgique et la France. En agissant de la sorte, les Occidentaux sont à l’origine de la dislocation et de la disparition du royaume qui s’ensuivit.

Ils condamnaient un peuple, uni, à ne plus vivre soudé, car chaque partie devait s’intégrer dans ce qui deviendra les Républiques actuelles avec tous les problèmes liés au conglomérat d’ethnies.

Mais, les colonisateurs qui avaient leurs propres historiens s’acharnent à donner une image positive de la colonisation.5 C’est ce qui ressort de l’intervention de l’un des ParticipantS n°11 : « Il revient aux Blancs, que cela vous plaise ou non, d’avoir mis fin à l’esclavage, sauf dans les pays arabo-musulmans, entre autres grâce à la colonisation, suivant des modalités diverses liées aux contingences indigènes locales. La seule faiblesse des Blancs est d’être de culture catho et donc empreinte d’un instinct de culpabilité, le péché originel n’est-ce pas !!! Ce qui fait que seul un certain nombre de Blancs se culpabilisent du fait de la politique de leurs aïeux, comme si les mentalités d’hier étaient celles d’aujourd’hui ou comme si le fait d’avoir eu un descendant peut-être esclavagiste était une faute héréditaire impardonnable transmise par les gènes de génération en génération, comme le péché originel en raison de la pomme qu’aurait fait dévorer à un certain Adam et une certaine Eve. Chez les Noirs, seul le président du Bénin a dû prononcer des mots d’excuse envers ses frères noirs pour la traite exercée par le passé par ce pays. Les Asiatiques s’en fichent et l’on a oublié, les Arabo-musulmans qui nient simplement la réalité de l’implication de l’Islam dans ces actes perpétrés par leurs frères de religion et qui perdurent encore aujourd’hui en Mauritanie (abolition de l’esclavage en 1981 seulement), dans les pays du Golf, en Somalie etc. bref partout ou l’Islam est implanté dans ses formes les plus frustes. »

J’ai jugé utile de reproduire ce texte dans la mesure où il constitue la thèse des défenseurs de la colonisation en Afrique, en Asie, en Amérique et ailleurs.

La vérité est que la colonisation en Afrique est avant tout un commerce né sur les cendres de l’esclavage. En resumé « …entre colonisateur et colonisé, il n’y a de place que pour le travail forcé, l’intimidation, la pression, la police, le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance. Aucun contact humain, mais des rapports de domination et de soumission…de sociétés vidées d’elles-mêmes, de cultures piétinées, de terres confisquées, de religions assassinées…des milliers d’hommes sacrifiés au Congo, de millions d’hommes arrachés à leurs dieux, à leurs terres, à leurs habitudes, à leur vie, à la danse, à la sagesse…de millions d’hommes à qui on a inculqué la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir…d’économies naturelles à la mesure de l’homme indigène désorganisées, de cultures vivrières détruites, de sous-alimentation installée.»6 

Dans ces conditions, les dés étaient jetés d’avance. Le sort de milliers d’Africains était scellé et leur identité nationale gommée, tout simplement. Affaiblis, presque anéantis, c’est dans ces conditions qu’ils devaient aborder l’avenir. La suite sera sans équivoque : « En transformant l'homme-marchandise en homme marchand, les Occidentaux ont intégré les peuples africains et d'autres peuples non-Occidentaux dans le marché mondial dont ils étaient les maîtres. C'est pourquoi l'analyse des phénomènes actuels de recolonisation, de sous-développement et d'appauvrissement peut être située dans la stricte continuité de phénomènes plus anciens et permanents » 7

Les Koongos ne feront pas exception à la règle. Comme tous les Africains, ils divinisaient la nature. Chez eux, l’homme ne dominait pas la nature car il vivait à ses dépens et la respectait. Il est lui-même partie intégrante de la nature. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la présence des exploitations à taille humaine, simplement pour répondre aux besoins alimentaires de la famille, ce que j’appelle le travail de subsistance.

Les Koongos étaient solidaires de tous les membres de leur clan d’abord, de l’ethnie ensuite. De toute façon, dès qu’un individu avait le sang de l’ethnie, il était immédiatement adopté dans le clan. A la tête du clan, il y avait un Mfumu nkanda (chef de clan), gérant des biens de tous les vivants et des ancêtres, mais, il n’était que le gérant et non le propriétaire, et veillait au bien-être de tous. Au nom de la solidarité, tous les membres du clan venaient en aide aux plus faibles de telle sorte qu’il n’y avait pas de pauvres. Chacun travaillait pour tous. Ce que d’aucuns ont appelé le socialisme Bantou8, ce qui d’emblée exclut toute tentative d’enrichissement personnel par accumulation de biens ou par accession à la propriété. La vie est limitée au groupe et l’économie est un système de cueillette et de subsistance. On ne travaille que pour satisfaire les besoins fondamentaux. Ce qui n’exclut pas la constitution des réserves, mais gérées de façon rationnelle par l’ensemble du groupe. Ainsi compris, le travail n’était pas au centre des préoccupations des Africains, si bien qu’il n’y avait jamais de pénuries ou de crises alimentaires. On ne cherchait pas à devenir riche, au sens que l’Occident donne à ce mot. Etre riche, c’était avant tout être en harmonie avec les autres membres du clan et surtout avoir des enfants si possible nombreux, car ils étaient la richesse du clan.

En aucun cas, l’individualisme n’était toléré. Ce qui nous éloigne de la vision occidentale, plus préoccupée par l’individu que par le groupe. En effet, la vision que donne l’Européen de la réussite personnelle permet de penser que c’est ‘’ la’’ question, quoi qu’il en soit des dégâts consécutifs. La fin justifie les moyens. C’est ce dont Rousseau a voulu témoigner. Il explique qu'au début de l'humanité, dans « l'état de nature », l'homme vivait heureux en harmonie avec la nature. Un jour, l’imposteur trouva des gens assez faibles pour le croire et leur déclara : - « Ceci est à moi ». Ce fut l'origine de la propriété privée. Il devenait propriétaire des terres et de tous les biens qui s'y trouvaient, l’homme compris. Ces derniers devenus ses sujets lui devaient soumission, obéissance, taxes et impôts. C'est « l'état de société», l'homme  perdit son bonheur.

C'est le début d'une chaîne de malheurs pour la majorité d'entre nous. L'imposteur-spoliateur, devenu plus tard propriétaire et reconnu comme tel, imposa des lois pour se protéger et mit des gardiens à son service pour arrêter toute tentative de remise en cause de son autorité et de sa propriété. Les tribunaux devaient juger en sa faveur. Rousseau dira « les lois sont faites pour les fripouilles. » Les sujets devenaient des machines de production des biens du chef Roi ou Seigneur. Il a le droit de vie ou de mort sur eux. C'est ce que Marx appellera « l'exploitation de l'homme par l'homme.» Cet acharnement à toujours plus de profit expliquerait aussi la traite des Noirs, le colonialisme et la françafrique.

Cette image n’a presque pas évolué, l’imposteur-spoliateur, c’est l’ensemble des capitalistes voyous de nos jours. Ils ont réduit les salariés au rang de gros producteurs et petits consommateurs par l’attribution d’un salaire minimum pour des besoins minima. Ils ont soumis la nature à leurs caprices devenant « maîtres et possesseurs »  selon les mots de Francis Bacon. Il faut à tout prix transformer la nature, peu importe le résultat, et la dominer. Ils détruisent autour d’eux et loin d’eux. La forêt de la cuvette congolaise va disparaître et l'Amazonie connaît le même sort. L’exploitation à outrance avec arrogance est aujourd’hui responsable dans une certaine mesure des problèmes environnementaux. C'est la puissance de la vision utilitariste qui gouverne le monde. Tout doit rapporter. Le but est clair : amasser, et encore amasser les trésors de la terre. Devenir riche. La richesse à leurs yeux  confère la puissance. La puissance à son tour confère le bonheur. L'argent passe avant l'homme.

Ce schéma est l’opposé du monde tel qu’il doit être dans la tradition koongo en particulier et dans la tradition africaine dans l’ensemble. Et pourtant, c’est ce modèle qui se présente et s’impose aux Africains dans le nouveau monde où ils ont été placés contre leur gré. Soit, ils avancent tête baissée, pieds et mains liés, dans ce cas, une chose est sûre ils seront toujours les dominés ; soit ils reculent vers le monde qui était le leur, mais dont plus personne ne se souvient.

C’est dans cette condition où ne manque pas les d’ambiguïtés de multiples tractations, que les Africains arrachent leur ‘’autonomie’’ auprès des puissances colonialistes. Autour des années 1960, les Africains proclament leur indépendance, théoriquement seulement, car, l’élite, est culturellement perdue. Ces « nouveaux Blancs » remplacent inexorablement les Européens dans la dynamique de l’africanisation des hauts postes. Dans beaucoup de cas, en exigeant l’indépendance, ils étaient certains de devenir les nouveaux maîtres. Ils étaient quasiment unanimes à croire que l’indépendance serait synonyme de liberté, d’émancipation et de développement du continent ; ils avaient la certitude d’en posséder les codes. Ils ignoraient le poids de l’héritage d’un passé fait de plus de cinq siècles de domination européenne.

 

1 Le Matswaniste était un groupe aux revendications politiques avant de devenir une religion

 

2 Fondateur de la religion kimbanguiste

 

3 Genèse 9, 26-27. p 40

 

4 G. Bruno

 

5 A ce sujet, il faut rappeler que J. Chirac voulait imposer aux enseignants d’insister sur les aspects positifs de la colonisation. Par ailleurs, les Autorités algériennes voudraient porter plainte contre la France pour les massacres commis lors de la colonisation en Algérie.

 

6 Césaire A.

 

7 Buxton

 

8 Par comparaison au socialisme scientifique

 

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